Amelie around the world, dans les Pouilles

Oui Monopoli existe. C’est un petit port assez charmant et très animé dans les Pouilles, entre Bari et Lecce. Très beau hasard d’y rencontrer une exposition sur Miró, installé ​dans le fort qui surplombe la mer au cœur du village.

L’exposition présente des dessins et lithographies issus de 3 projets dans la même lignée surréaliste et on y découvre un Miró illustrateur.

La première série s’appelle Les pénalités de l’enfer ou les Nouvelles Hébrides. Ce travail est issu d’un dialogue entre Miró et son ami intime : le poète Robert Desnos. Les deux compères se sont rencontrés en 1925 alors qu’ils fréquentaient ensemble le groupe parisien des surréalistes.

La même année l’idée d’une collaboration apparaît. Elle est ralentie par les prémices de la guerre civile en E​spagne et l’arrivée de la seconde guerre mondiale en Europe.

En 1944, Robert Desnos, engagé dans la résistance, est déporté et meurt dans un​ camps de concentration. Sa femme décide alors de prendre le relai de ce projet qui lui tenait à cœur : elle envoie les textes posthumes à Miró pour les illustrer.

L’ouvrage, sans doute loin de l’intention initiale des deux amis, est publié par Maeght en 1974.

Le texte fait référence à un monde où le paradis et l’enfer s’entremêlent, le sommeil et la veille, la joie et la peur...on y trouve des références érotiques et psychanalytiques. Un mélange de prose, de proverbes, d’expressions, d’humour et de parodie. Les 25 illustrations de Miró sont à la hauteur de ce lexique surréaliste : riches en symboles (poisson, étoiles, cornes, etc) et « en tracés » avec de nombreuses lignes qui s’entremêlent comme des notes de musiques.

La dernière séquence est plus aérée et plus facile à « lire », une famille, un bouquet, une maison au soleil ; le trait naïf de l’artiste nous guide avec ​plus de ​légèreté.

La seconde série s’appelle Le Lézard aux plumes d’or. Cette série est l’illustration d’un de ses propres textes, les Jeux poétiques rédigés en 1946 (commandés par les Cahiers d’art). L’influence surréaliste se ressent encore avec une multiplication d’images, de gestes et de mouvements. Le répertoire de symboles est à l’image du titre fantastique de son texte (difficile d’imaginer un lézard en plume...). On a vraiment l’impression ici que c’est le texte qui illustre les dessins magiques de l’artiste : « la neige rose », « les points rouges de ma cravate », « les dessous bleus », « les poissons violets » ou encore « un papillon écarlate [qui] fait son nid dans le décolleté de [son] amie ».

La dernière série présentée est une illustration d’Ubu roi de Jarry. On y devine le roi grossier, les dessins sont riches, presque étouffés, il n'y a plus de "blanc", ​le trait est ​plus précis et les couleurs plus criardes. On devine la boulimie du personnage déglingué de l’auteur. On reconnaît un pied, un plat, du foutoir, du bruit et du trop plein ! Des dessins toujours pleins d’allusions et suggestions, au cœur du mouvement Dada.